Accoucher dans le secret n’est pas facile… une autre façon d’aimer

*Témoignage écrit quelques temps après Magnificat*

Il y a quelques années, j’ai donné la vie à un petit garçon, après 9 mois de grossesse. Je n’avais pas 20 ans, jeune et insouciante, je portais l’enfant d’une histoire pathétique avec un « Don Juan », qui m’a bien fait comprendre : « Tu avortes ou c’est la porte », tout en m’embrassant le ventre et en disant au « têtard », comme il disait : « coucou toi, ça va ? ».

Soutenue par ma famille, je suis allée à Magnificat pour vivre sereinement ma grossesse et préparer mon choix : porter cet enfant qui vivait en moi, dont j’ai vu le cœur battre à l’échographie à 8 semaines de grossesse, et j’ai compris ce jour que je portais la vie.

Tous les matins à Magnificat, je faisais une petite marche et allais réciter mon chapelet. Cela me faisait bêtement sourire alors que quelques mois auparavant, je faisais la fiesta, séductrice, je savais que je plaisais aux hommes et pas qu’à ce Léo (nous l’appellerons Léo), entre alcool, cocaïne et milieux pervers, dégueulasse et malsain de ce que je cherchais, à l’opposé de la jeune fille catho, bien éduquée, scoutisme et compagnie…

Le petit garçon que j’ai porté, je l’ai aimé, aimé si fort que je lui ai écrit de longues lettres, aimé si fort que j’ai assumé cette grossesse et je l’ai fait vivre, offert comme un cadeau à un homme et une femme. Pendant ces quelques mois, j’ai beaucoup parlé avec une personne de l’œuvre d’adoption, mon choix était mûrement choisi.

Le jour de l’accouchement, j’ai senti ce petit partir petit à petit. L’accouchement fut douloureux, mais je me suis sentie propre, propre en ma décision.

Je suis allée voir le bébé avec Aurore, une personne de la Maison, à la pouponnière. Cet enfant était très beau et m’écoutait quand je lui ai parlé tout doucement (mais ce que je lui ai dit reste entre lui et moi !).

J’ai traversé des moments de doutes, de manque de lui mais tout en étant détachée.

Je pense à ce petit tous les ans pour son anniversaire et je suis sure qu’il est plein de vie et heureux.

Il m’est arrivé de lui écrire des lettres pour son dossier et lui dire combien je l’ai aimé et porté dans l’amour et le calme.

Aujourd’hui, je suis en couple et j’ai un enfant. J’aime mon enfant comme si c’était le seul, l’unique. Le petit garçon que j’ai eu avant, j’en ai fait le deuil, ce n’est plus le mien, mais celui d’une autre femme qui l’a attendu et tant espéré avec son conjoint.

Accoucher dans le secret n’est pas facile, c’est un engagement muri et choisi avec patience, réflexion, pleurs aussi mais un choix assumé. Il y a un petit qui vit quelque part, de mon sang, ma chair, mais qui est heureux par l’amour de ses parents. Je me sens toujours aussi confiante dans ce choix que j’ai fait. Je me sens sereine et propre par mes convictions.

Aujourd’hui je vis, heureuse avec un homme que j’aime et notre enfant. Le passé est dans mon cœur pour toujours ; je ne l’oublierais jamais, car cet enfant m’a détachée de Léo, dont je n’arrivais pas à me défaire. Sans cet enfant je serais certainement devenue une droguée, une fille perdue…

Je me sens pure dans mon choix et belle dans la beauté de mon geste.

A ma famille, mon homme, notre enfant, mes parents, frère et sœurs, je vous aime.